Face à la crise du logement dans les grandes villes marocaines, le ministère de l’Habitat prépare un programme inédit de logements locatifs intermédiaires destiné aux classes moyennes et aux jeunes actifs.
Le gouvernement marocain s’apprête à lancer un nouveau programme de logements locatifs intermédiaires (LLI), avec pour objectif de soulager la pression immobilière dans les zones urbaines tendues et de faciliter l’accès au logement pour les ménages à revenus moyens.
Ce dispositif, actuellement en phase d’étude, bénéficiera d’une enveloppe budgétaire de 3,5 millions de dirhams pour définir ses contours. Il s’inscrit dans une stratégie nationale visant à diversifier l’offre immobilière et à apporter une réponse ciblée aux tensions du marché locatif, particulièrement marquées à Casablanca, Rabat, Marrakech et Tanger.
Selon les données du dernier recensement général de 2024, le taux d’urbanisation atteint désormais 62,8 %, contre 60,3 % dix ans plus tôt. Cette évolution démographique accroît la pression sur le parc locatif, accentuant les difficultés d’accès au logement, notamment pour les jeunes actifs et les ménages ne pouvant prétendre ni au logement social ni au marché privé libre.
Une offre entre le logement social et le privé libre
Le logement locatif intermédiaire se positionne comme une alternative à loyers maîtrisés, s’adressant à une population souvent exclue des deux extrêmes du marché immobilier. Ni assez pauvre pour bénéficier de logements sociaux subventionnés, ni assez riche pour accéder au marché libre, la classe moyenne peine à se loger dignement dans les grandes villes.
Le programme en cours d’élaboration prévoit des montages immobiliers variés, notamment :
L’acquisition ou l’auto-construction de logements destinés à la location à prix plafonnés,
La sous-location via des entités spécialisées, avec prise en charge du risque locatif,
La rénovation de logements existants, avec gestion locative confiée à un opérateur dédié.
Un dispositif évolutif vers l’accession à la propriété
Au-delà de la dimension locative, le ministère de l’Habitat envisage un parcours résidentiel évolutif, avec l’introduction d’un système d’épargne adossé au loyer. Une partie du montant payé mensuellement serait ainsi capitalisée pour constituer un apport personnel, destiné à faciliter une future accession à la propriété.
Cette approche, inspirée de pratiques internationales, vise à transformer progressivement les locataires en propriétaires, tout en stabilisant le marché locatif et en renforçant la mobilité résidentielle.
Une étude stratégique pour définir le cadre opérationnel
La consultation lancée par le ministère, dotée de 3,5 millions de dirhams, devra préciser :
Les critères d’éligibilité des bénéficiaires,
Les mécanismes de plafonnement des loyers,
Le rôle des opérateurs publics et privés,
Le modèle économique du dispositif,
Et les zones géographiques prioritaires.
L’étude évaluera également les incitations fiscales ou financières nécessaires pour attirer les investisseurs et assurer la viabilité économique du modèle locatif intermédiaire.
Un contexte de relance du secteur immobilier
Ce projet intervient dans un contexte où le logement social est en perte de vitesse et où la demande pour des logements adaptés aux revenus moyens reste largement insatisfaite. Les autorités comptent sur le LLI pour stimuler le secteur immobilier, tout en répondant à une attente sociale grandissante.
Selon des sources internes au ministère, une première série de projets pilotes pourrait être déployée dès 2026, à l’issue de la phase d’étude et de cadrage.
Des enjeux multiples pour les pouvoirs publics
Le développement du logement locatif intermédiaire vise à :
Limiter l’étalement urbain anarchique,
Réduire les bidonvilles informels,
Améliorer la qualité de vie des citoyens,
Et soutenir l’emploi dans le secteur du BTP.
Ce programme pourrait également servir de levier d’attractivité économique pour les grandes villes marocaines, en facilitant l’installation des jeunes travailleurs, des fonctionnaires et des familles nouvellement formées.
Avec ce nouveau dispositif, le ministère de l’Habitat cherche à corriger les déséquilibres persistants du marché locatif marocain et à répondre aux aspirations de la classe moyenne, souvent négligée par les politiques publiques en matière d’habitat. Si l’étude aboutit à des solutions viables, le logement locatif intermédiaire pourrait devenir un pilier durable de la politique urbaine au Maroc.