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Secteur des EEP : Une réforme en marche

Secteur des EEP : Une réforme en marche

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EEP : un programme d’investissement prévisionnel de 137,7 MMDH en 2025 (rapport)

Par Yosra Bougarba.

Le Maroc avance résolument dans la réforme des établissements et entreprises publics (EEP), un pilier stratégique destiné à consolider la souveraineté nationale et à promouvoir l’intégration économique régionale et internationale.

Cette réforme, qui devra connaitre un tournant décisif en 2025, s’inscrit dans une vision d’amélioration de la performance des EEP, tout en renforçant leur rôle dans la justice territoriale et en favorisant une dynamique de croissance durable qui répond aux besoins des citoyens.

En effet, la ministre de l’Économie et des Finances, Nadia Fettah, avait réaffirmé, lors de la séance plénière conjointe des deux Chambres du Parlement du 19 octobre dernier, qui a été consacrée à la présentation des grandes lignes de ce projet de loi de finances (PLF 2025), l’engagement du gouvernement à exécuter les Hautes Instructions Royales pour transformer le portefeuille public en un levier majeur de développement économique.

C’est dans ce sens que l’Agence nationale de gestion stratégique des participations de l’Etat et de suivi des performances des établissements et entreprises publics (ANGSPE), avec 57 EEP dans son périmètre, est engagée dans une stratégie ambitieuse qui s’inscrit dans le sillage de la vision Royale qui appelle à une modernisation et une restructuration ambitieuses du secteur public marocain, en phase avec les objectifs nationaux de développement durable et de croissance économique.

Un investissement d’envergure pour un rôle stratégique

Pour l’année prochaine, le PLF prévoit une somme de 138 milliards de dirhams (MMDH) pour les EEP, sur un total de 340 MMDH d’investissements publics.

Cette enveloppe importante contribuerait au renforcement de ces institutions et au soutien de leur mission, permettant ainsi aux EEP d’assumer leur rôle crucial dans le développement économique du pays, comme l’a relevé l’économiste et spécialiste des politiques publiques, Abdelghani Youmni.

“Le rôle des EEP est primordial dans la phase de construction des infrastructures productives afin de faire du Maroc une piste d’atterrissage des chaînes de valeurs globales et une passerelle économique continentale. Toutefois, à l’exception du groupe OCP, avec un investissement de 45 MMDH et un chiffre d’affaires de 105 MMDH, aucune autre entreprise publique n’assume véritablement cette fonction de pompe d’irrigation”, a expliqué l’économiste dans une interview accordée à la MAP.

Pour lui, il est impératif de développer de nouvelles locomotives publiques ou privées pour réduire la pression sur les finances publiques et accompagner l’émergence.

La réforme des EEP au service de la souveraineté et de la performance

Dans le cadre de la dynamique de la réforme des EEP et de la régionalisation avancée, l’accélération des projets de création et de réorganisation de certains EEP se poursuit au niveau territorial, avec notamment la création de 12 sociétés régionales multiservices (SRM) pour remplacer les Régies de distribution et les Directions régionales de distribution de l’Office national de l’électricité et de l’eau potable (ONEE).

D’après le rapport sur les EEP accompagnant le PLF 2025, il sera parallèlement procédé à la création de 12 groupements sanitaires territoriaux, en remplacement de tous les établissements de santé du secteur public relevant de son ressort territorial, notamment les centres hospitaliers universitaires, à l’exclusion, toutefois, des établissements de santé régis par des textes législatifs ou réglementaires particuliers, des établissements de santé militaires et des bureaux communaux d’hygiène.

Ces mesures vont dans le sens d’une souveraineté renforcée, a estimé M. Youmni, ajoutant que le Maroc a décidé de faire des secteurs stratégiques, tels que l’eau, l’électricité et l’assainissement, des leviers de sa souveraineté.

Le Royaume devient ainsi, de plus en plus, un acteur dans la concession de la gestion déléguée au profit d’autres pays africains, a fait valoir l’expert.

Cependant, M. Youmni a précisé que l’impact de ces nouvelles structures ne pourra être évalué pleinement qu’après trois à cinq ans.

Et de soulever : “Cette nouveauté est une réelle mise à l’épreuve du management public territorialisé et de l’efficience des régions et communes. Les nouvelles structures permettront aux collectivités territoriales en charge de choisir leurs modes de gestion, mais il faudra un certain temps pour mesurer l’impact sur le bien-être des usagers”.

Dans ce sillage, le spécialiste a insisté sur l’importance de la bonne gouvernance et de l’évaluation des résultats de ces nouvelles initiatives.

Vers une économie diversifiée et résiliente

L’un des objectifs majeurs de la réforme des EEP est d’ancrer le Maroc dans une dynamique économique internationale.

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Le PLF 2025 prévoit le versement par les EEP de plus de 19,5 MMDH de produits au budget général de l’Etat hors produits de cessions d’actifs et de privatisation, tout en allouant simultanément 103,2 MMDH d’investissements à ceux qui relèvent du périmètre de l’ANGSPE.

Ce ratio de 1 pour 5, selon M. Youmni, reflète l’engagement du gouvernement pour asseoir la souveraineté nationale et faire réussir le nouveau modèle de développement du Maroc.

Toutefois, cela nécessite une synergie “entre l’économique et le politique pour bâtir les fondements de la nouvelle politique d’émergence du Maroc”, a-t-il préconisé.
À terme, l’objectif serait d’orienter le modèle économique marocain vers une dynamique où les investissements privés occuperaient une place prépondérante, représentant 60% de l’investissement global, tandis que les investissements publics seraient réduits à 30%, a rappelé l’économiste.

Un impact microéconomique pour une croissance durable

En outre, M. Youmni a indiqué que l’impact des investissements publics n’est pas principalement économique, car ces investissements, de nature macroéconomique, n’ont qu’un effet de levier limité de 0,3 point pour chaque point dépensé.

Il a fait savoir que l’effet positif des investissements publics se fait surtout ressentir au niveau microéconomique, se manifestant à travers les gains de productivité, la création d’unités de production manufacturière et l’attractivité des investissements directs étrangers.

Et c’est dans cette optique que le PLF 2025 et les cinq prochaines années de politiques financières visent à construire les infrastructures nécessaires pour accueillir des événements d’envergure internationale, comme la Coupe du Monde de la FIFA 2030, et pour transformer le Maroc en une vitrine industrielle innovante et diversifiée, a noté l’économiste.

Cette approche nécessite aussi une mutation progressive du modèle économique, afin de privilégier la demande extérieure au détriment de la demande intérieure, a-t-il soutenu.

À cet égard, M. Youmni a estimé qu’il est nécessaire de réduire la dépendance aux fonds publics pour éviter une spirale d’endettement et d’inflation, et ainsi faire triompher la microéconomie sur la macroéconomie.

Avec la réforme des EEP, le Maroc continue d’œuvrer en faveur d’une gouvernance optimisée et une dynamique d’investissement renforcée au sein de ces institutions, à même de les propulser en tant qu’acteurs incontournables du développement économique national, tout en positionnant le secteur comme un moteur essentiel pour le rayonnement du Royaume sur la scène internationale.

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